Le Housatonic at Stockbridge de C. Ives

 

 

Introduction

 

The Housatonic at Stockbridge était écrit comme troisième mouvement des Three Places in New England. Ives était inspiré par le fleuve Housatonic qu’il a vu lors de son voyage de noces[1]. Dans l’esquisse de cette pièce du 30 juin 1908, la formation était composée d'une flûte, des cordes et un orgue[2]. Ives a finalement élargi cette formation à l’orchestre avec des percussions (une timbale et un piano pour 4 mains) et une basse d’orgue en 1914. Cette version orchestrale est regroupée avec deux autres pièces: The ‘St. Gaudiens’ in Boston Common comme premier mouvement et Putnam’s Camp, Redding, Connecticut comme deuxième. Cette série est alors nommée Three Places in New England (Orchestral Set No.1). Par la suite, il a arrangé ce morceau pour le piano et la voix en 1921.

 Dans ce mémoire, nous regardons les deux versions suivantes: celle orchestrale de 1914 et celle chantée de 1921. Une impression du jour mémorable de sa lune de miel et le beau texte de  Robert Underwood Johnson ont encouragé Ives à composer une pièce très pittoresque, énergique et très expérimentale. En analysant les 2 versions, on devine ses concepts inventifs et écritures caractéristiques.


 

Histoire de la pièce

 

 Selon la liste d’œuvres de Charles Ives dans Charles E. Ives Memos qui est éditée par Kirkpatrick, The Housatonic at Stockbridge était composé avant les 2 autres mouvements de The Three Places in New England. La date d’esquisse de Boston Common est juillet-août 1911, celle de Putnam’s Camp est 1912 et The Housatonic at Stockbridge est mai 1911 dans cette liste[3].

 En fait, la date des compositions dans la liste est douteuse. Ives a souvent mis plusieurs titres pour une même pièce (en fait, ce The Three Places in New England s’appelle aussi 1st Orchestra Set ou Orchestra Set No.1). De plus, il révise ses œuvres plusieurs fois, donc il y a de temps en temps des versions différentes d'une même pièce, et ses esquisses ne sont pas toujours claires du point de vue de la datation. En raison de ce flou dans l'ordre d'élaboration des œuvres, il est peut-être mieux de ne pas décider hâtivement que The Housatonic at Stockbridge précède les deux autres mouvements.  Ives a déjà précisé que l’origine du second mouvement de cet Orchestra Set No.1  (The Children’s Holiday at Putnam’s Camp) est une Ouverture et marche pour petit orchestre ou petite harmonie qui était écrite en 1902-03[4], donc il est toujours possible de trouver d'autres racines à chaque mouvement d’Orchestra Set No.1, avant 1911.

 Il est difficile de trouver la date de composition précisément, mais pourtant possible de la fixer pour ce The Housatonic at Stockbridge. Il a commencé à écrire sa première esquisse en juin 1908[5]. Dans son scrapbook, nous trouvons:

 

The Housatonic at Stockbridge a été suggéré par une promenade un dimanche matin…nous[6] nous promenions dans le pré à côté de fleuve, et écoutions la chanson de loin de l’église sur l’autre rive.

p.87 [KIRKPATRICK, 1991]

 

 Il a commencé d'écrire après cette promenade une esquisse de la pièce, inspiré par deux choses différentes ; un paysage de fleuve et la chanson (hymne) de l’église. La première idée importante de The Housatonic at Stockbridge est donc la juxtaposition de deux éléments différents dans une pièce, qui se réalise par l’écriture de strates et l’introduction des mélodies d’hymnes.

 De 1908 à 1914 (de l’année de cette première esquisse jusqu’à la date d’accomplissement de la version orchestrale de cette pièce), Ives tentait déjà dans son écriture, une juxtaposition/citation et superposition de strates, de couches musicales.  Par exemple, Holidays Symphony était déjà écrit en 1904-1913 ou Concord Sonata pour piano en 1912-1915 et ces pièces montrent la même technique de juxtaposition/citation et de strates.

 Selon Shitamich,  1908-1917 (de son mariage avec Harmony Twitchell jusque à peu de temps avant la diminution des capacités du compositeur à cause de sa crise cardiaque) est une période de murissement pour Ives[7]. Durant celle-ci, il a composé ces œuvres principales: The Unanswered Question — pièce très inventive et très Ivesienne composée en 1908,  les Orchestra Set No.1 et No.2, Holydays Symphony, 4th Symphony, Concord Sonata, 2nd String Quartet, 2nd, 3rd et 4th Violin Sonata sont écrit à cette époque-là. Il y a également un Chorale for strings, contenant des quart de tons. Et une esquisse de Majority, pièce pour chœur et orchestre qui contient beaucoup de clusters, en 1914.

 En regardant ces œuvres-là, il semble que l’appui de sa femme Harmony Twitchell était vraiment fort et son existence encourageait Ives à composer des pièces inventives très librement.

 Après cette période, Ives a arrangé The Housatonic at Stockbridge pour une formation piano-chant en 1922,  édité par le compositeur lui-même dans un joli livre « 114 Songs »  publié la même année. Il a aussi arrangé d'autres de ses œuvres instrumentales pour voix et piano cette année (ou aux alentours). Par exemple, il y a au moins 2 pièces orchestrales qui sont adaptées pour le chant : Paracelsus (d'après la Browning Overture datant de 1908-1912) et West London (d'après la Matthew Arnold Overture de 1912)[8].

 Mais parmi les œuvres dont  la formation instrumentale a été changée en voix et piano, The Housatonic at Stockbridge est exceptionnelle, parce que la partition de la version orchestrale de 1914 contient déjà une version du texte du chant. Dès le début, Ives s'est inspiré de ce texte de Robert Underwood Johnson. Nous montrerons plus tard que la forme de ce dernier mouvement d’Orchestra Set est influencée par la structure de cette poésie, et la mélodie principale contient aussi des figuralismes.

 


 

La forme

 

Avant d'examiner les détails de cette pièce, nous confirmons la forme macroscopique de la version orchestrale d’abord. Quand Ives a écrit le chant de cette pièce en 1921, il ne changea pas la forme basique orchestrale, donc commençons par la première version de cette pièce (la version d’orchestrale de 1914) et nous regarderons les différences entre elles après.

 En n’hésitant pas à simplifier le processus, The Housatonic at Stockbridge projette de faire un grand crescendo de 44 mesures[9].  La pièce débute par une sonorité très faible (les cordes jouent en sourdine) et un tempo très lent, indiqué Adagio molto. Des strates composées de 12 sons continuent quasiment sans arrêt jusqu’à la fin, et la basse —violoncelle et contrebasse avec une pédale d’orgue — joue une pédale de Do# presque tout le temps jusqu’à la mesure 30. Après la mesure 30 qui est marquée Più moto crescendo, le tempo est accéléré et la basse commence à jouer des chromatismes. Dans la mesure 42, cette accélération se ramène à grand accord en tutti ffff et il est indiqué « sans decrescendo ». La pièce se termine avec un petit écho d’une hymne.

 On peut découper cette pièce en cinq parties.

 

V

W

X

Y

Z

Orchestre

m. 1

m. 15

m. 21

m. 32

m. 42

Vo/Pf

m. 1

m. 14

m.20

m. 30

m. 39

La mélodie

Mélodie I-a  (Réb majeur)

Mélodie I-a déformée (Réb majeur/Ré majeur)

Mélodie I-b (Mi majeur)

Mélodie II

(Un fragment de la Mélodie en Mi majeur)

Les strates de l’orchestre

Cordes et piano

Cordes et piano

Bois et piano

Cordes,  bois et piano

Tutti

cluster

La basse

Pédale de Do#

Sauf m.13-14(orch)/13(vo)

Pédale de Do#

Sauf m.19 (orch)

Pédale de Do#

 

Mouvement chromatique

 

Le texte du chant

Première strophe

Deuxième strophe

Troisième strophe

Quatrième strophe

 

 

 Ives a conservé plusieurs techniques pour garder la même ambiance entre chaque partie, donc cette division n'est pas toujours très distincte selon l'interprétation, mais en regardant  quelque peu l'écriture, elle se justifie.

 La première partie V (Adagio molto) commence par des strates de cordes. Sauf que la basse (violoncelle et contrebasse) et les violons II et III, sont marqués avec sourdine. Les violons jouent ppp ou pppp, les altos pp et la basse; Ives a mis les petites notes « p-mp sans sourdine, mais assez fort pour jeter les autres cordes au fond ». Pendant cette partie, basson, trombone et piano renforcent de temps en temps ces strates et la basse. A la mesure 6, le cor expose la mélodie, partagée avec le cor anglais. En fait, il n’y a pas d’indication du nombre d'instruments, donc Ives a mis mp-mf sous les deux instruments qui jouent la mélodie et noté « cela dépend du volume et de la position des cordes aigües--- mais satisfaisant fort de laisser leur au fond ». Avant la mesure 15, les strates commencent à jouer en quintolets, et c’est le seul moment dans cette partie où les cordes jouent de manière  homorythmique. Cette partie se termine avec un accord en valeur longue (une blanche) marqué poco rit.

 À la mesure 15 a tempo, la nouvelle partie W commence avec les mêmes strates qu’au début. La formation est exactement la même qu'à la partie V, mais à la mesure 19 il y a un petit mouvement descendant à la basse, et la mélodie dans cette partie module souvent un demi-ton au-dessus.

 Entre les parties W et X, il y a un grand changement dans la formation des strates. A la mesure 21, les bois (flûte, hautbois, clarinette et basson) jouent des strates en remplacement des cordes. Les altos restent et jouent une strate et la basse maintient la pédale de Do#, mais d'autres cordes (violon et une partie de violoncelle) jouent la mélodie mf-f. Il est remarquable que la partie de piano soit divisée en deux rôles différents ; une partie qui était originairement composée pour deux harpes et une partie pour piano ou célesta. Le rythme de la partie des deux harpes est discordant et une autre partie (celle de célesta) va bien  avec celle de flûte. Après la mesure 30, les cordes commencent petit à petit à jouer les strates au début. 

 La partie Y commence par la mesure 32, Piu moto crescendo. Après cette mesure, le tempo est accéléré, les volumes de chaque instrument sont augmentés jusqu’à leurs limites graduellement, des strates ont changé d'allure, et la mélodie est jouée par des cuivres, f. Avant la mesure 32, nous retrouvons la même formation de strates que dans la partie précédente, mais dans la mesure 34, il y a un grand mouvement chromatique (descendant aux violon, alto et flûte, et ascendant aux clarinette et violoncelle). Après ce geste, des bois commencent à jouer des strates avec un rythme complexe (souvent des quintolets de doubles-cloches). Les cor et trompette jouent la mélodie, mais il n’est pas toujours très clair qu’il s’agisse de la mélodie principale en raison de son chromatisme et de la sonorité épaisse de la fin de cette partie. La basse bouge chromatiquement et les basson, trombone et tuba la fortifient toujours. La timbale fait un roulement depuis peu, juste avant cette partie (mesure 31). Violon I et II jouent ensemble, et les altos sont divisés en deux parties assez synchronisées. A la mesure 39, Allegro con brio, des cordes (incluant la partie de basse)  et la clarinette commencent  à jouer le passage en gamme par ton homorythmique dans le registre aigu. Le hautbois joue ce même motif un peu décalé. La partie de basse arrête son chromatisme et joue Ré#-Do# avec glissando.

 Après un grand glissando à la fin de partie Y, la partie Z inclut un grand accord et son ombre. Pendant presque deux mesures (mesure 42-43), il joue un cluster en ffff sans decrescendo. Et tout soudainement, cette partie s'achève par une petite citation de l’hymne jouée par des cordes avec sourdine, comme un écho du grand accord précède.

 

 


 

Les différences et transformations importantes entre les deux versions

 

Entre les 2 Housatonic, Ives a arrangé la version orchestrale fidèlement pour voix et piano. Il n’y a pas de grand changement de forme, la version orchestrale est de 44 mesures et ce n’est pas très diffèrent de la version pour voix et piano qui en compte 40. Il a diminué la durée (par exemple, le cluster de la version voix et piano à la fin), et de temps en temps il a modifié la métrique.  Dans la version pour voix et piano, les polyrythmies en base irrationnelles (superposition de quintolets, triolets, etc.) sont évitées. Il garde la même mélodie et la basse en grande partie.

 

Orchestre

Voix et Piano

Mesure

1

Adagio molto (very slowly) (about 50=♩)

4/4

Mesure

1

Slowly and quietly

Aucune métrique n’est indiquée au début, bien que l’on soit clairement à 4/4.

Il ajoute deux noires (La et Sol) dans la partie de la main droite.

3

 

3

Dans la partie de la main droite, quatre doubles et une noire (La) sont ajoutés au lieu du mouvement amphibraque d’alto de l’orchestre.

4-6

 

4-6

Le mouvement de la main droite n’est pas le même que celui des notes de l’orchestre.

9-10

 

9-10

Des liaisons sur des notes de la mélodie et  la main droite ne sont pas les mêmes que les articulations de l’orchestre.

12-13

Il n’y a pas de changement de métrique.

12

5/4.

L’accord à la mesure 13 de l’orchestre est ajouté à la fin, et sa durée est diminuée d’une blanche à une noire.

13-14

poco rit. à la mesure 14.

13

Cette mesure débute par le deuxième accord de la mesure 13 de l’orchestre, et c’est unifié avec le dernier accord qui est lié au premier accord à la mesure 14 de l’orchestre.

Et à la fin, il ajoute le dernier accord à la mesure 14 de l’orchestre mais cet accord est diminué d’une blanche à une noire.

15

a tempo

14

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit clairement à 4/4.

rit.

16

Un staccato sur La de la mélodie.

15

a tempo

17-18

 

16-17

Des liaisons sur des notes de la mélodie ne sont pas les mêmes que les articulations de l’orchestre.

19

5/4

La basse descende jusqu’à Fa# et puis monte quinte diminue (La-Sol-Fa#-Do-Sib).

18

5/4

Toujours la pédale de Do# à la basse, et les sons de la basse de l’orchestre sont joué dans un registre milieu discrètement.

20

4/4

19

4/4

25

Des accents sur Sol# de la mélodie.

24

 

26

 

25

Des liaisons sur des notes de la mélodie ne sont pas les mêmes que les articulations de l’orchestre.

27

Des triolets de noir sur le deuxième - troisième temps de la mélodie.

26

Un rythme plus simplifié (deux noires en remplacement de triolets)  dans la mélodie.

28

 

27

Un nouveau contre-chant dans le piano sur le quatrième temps (Do-Si-La#).

29

Un dièse de Do sur le quatrième temps de la basse est mis entre parenthèse.

28

Do# à la basse devient Dob.

Des sons à la main droite ne sont pas les mêmes que l’orchestre.

30-31

 

29

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit à 6/4.

Les deuxième et troisième temps à la mesure 31 de l’orchestre sont coupés et l’accord à la mesure 31 de l’orchestre est ajouté à la fin. Cet accord est diminué sa durée d’une ronde à une branche.

32

Piu moto cresc.

30

Il n’y a pas de crescendo indiqué.

Des sons à la main droite ne sont pas les mêmes que l’orchestre.

33

from here on gradually louder and faster sur la partie de  trombone.

31

a little faster

Des sons à la main droite ne sont pas les mêmes que l’orchestre.

34-35

(m.34) accel. e cresc. a poco a poco

32

in a gradually animated way

Un rythme de la mélodie est modifié.

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit à 5/4.

Le deuxième temps de l’orchestre est coupé, et les premiers et deuxièmes temps de la mesure 35 de l’orchestre sont ajoutés à cette mesure.

Le mouvement chromatique à la basse est simplifié.

35-37

(m.35) Allegro moderato

33-34

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit à 4/4.

Les rythme et articulations de la mélodie sont  modifiés.

Après mesure 33, deux temps sont déplacés en comparaison de la notation de  l’orchestre.

38

Running from about 60 to 70 =, perhaps faster before J (J=m.42)

35

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit à 5/4.

Des sons à la main droite descendent une octave plus basse que l’orchestre.

Un rythme de la mélodie est modifié.

Dans la version orchestrale,  la trompette joue une 4te juste au -dessus de la mélodie de cor.

38-39

(m.39) Allegro con brio

36

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit à 4/4.

Il ajoute une blanche (La#) dans la partie de la main gauche sur le troisième temps.

39-40

 

37

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit à 5/4.

Un rythme de la mélodie est modifié.

Il change des sons accentués dans la partie de la main droite sur troisième et quatrième temps en La# et Sol#.

41

 

38

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit à 4/4.

Il modifie des sons dans la partie de la main droite sur le deuxième temps, et il change son écriture de la triple-croche à l’accord qui est rythmiquement très simple sur le troisième temps de la partie de piano.

42-43

Un cluster

39

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit à 5/4.

Un accord de « Si♭-Do-Ré-Mi-Fa-Sol-La »  remplace le cluster de l’orchestre.

Il diminue la durée du cluster à une ronde, et il ajoute un accord  sur  le deuxième temps de la mesure 43 de l’orchestre anticipé à la fin de cette mesure.

43-44

Adagio    molto

40

very slowly    più ten.

Aucune métrique n’est indiquée, bien que l’on soit à 4/4.

Il diminue la durée des accords et élimine un soupir à la fin de la partie d’orchestre.

 

 Il y a deux endroits dans le chant où Ives a coupé les phrases d’orchestre ; avant la mesure 15 et avant la mesure 32 de la version orchestrale, c’est-à-dire, avant les parties W et Y. On le parlera plus de détails après.


 

Le texte

 

Au commencement de la partition de The Housatonic at Stockbridge en 1914, Ives a inséré le poème de Robert Underwood Johnson qui porte le même titre, et ce poème est utilisé comme texte du chant en 1921.

 D’ailleurs en dehors de The Housatonic at Stockbridge,  Ives a composé au moins sept chants sur des textes de Robert Underwood Johnson: « At Sea » écrit pour orgue et violon  en 1902[10] et arrangé en 1921 pour voix et piano, « The New River » écrit pour trompette avant 1913[11] et arrangé en 1921, « "Nov. 2, 1920" » (cette pièce s’appelle « An Election » aussi) écrit pour chœur en unisson et orchestre, et arrangé en 1921 pour voix et piano également.[12] Et il y a quatre autres chants pour voix et piano ;  « Luck and Work »  écrit en 1920 et « Immortality », « Disclousure » et « Preminitions » en 1921[13].

 Dans la version voix et piano de The Housatonic at Stockbridge, Ives a enlevé une strophe et six vers du texte original, et il a ajouté plusieurs mots dans la dernière strophe.

 Penchons-nous sur le rapport entre le texte et la mélodie du chant. La version d’orchestre a précédé la version pour voix et piano, néanmoins il conserve la même mélodie de l’orchestre dans le chant. Cette mélodie correspond bien aux strophes du texte formellement et on peut y trouver plusieurs figuralismes. Donc même s'il a composé la version voix et piano sept ans après, il est possible de considérer qu'Ives a d'abord élaboré la mélodie à chanter avec le texte.

 Voici un tableau comparatif entre le poème original et le texte du chant en 1921.

 

Le poème original

Le texte du chant

 

From The Housatonic at Stockbridge

 

« Contented river ! in thy dreamy realm---

The cloudy willow and the plumy elm…

 

Thou hast grown human laboring with men

At wheel and spindle ; sorrow thou dost ken ; …

 

Thou beautiful ! From every dreamy hill

What eye but wanders with thee at thy will,

Imagining thy silver course unseen

Convoyed by two attendant streams of green….

 

Contented river ! and yet over-shy

To mask thy beauty from the eager eye ;

Hast thou a thought to hide from field and town ?

In some deep current of the sunlit brown

Art thou disquieted---still uncontent

With praise from thy Homeric bard, who lent

The world the placidness thou gavest him ?

Thee Bryant loved when life was at its brim ;…

 

Ah ! there’s a restive ripple, and the swift

Red leaves---September’s firstlings---faster drift ;

 

Wouldst thou away !.....

I also of much resting have a fear ;

Let me thy companion be

By fall and shallow to the adventurous sea ! »

 

 

The Housatonic at Stockbridge

 

 Contented river ! in thy dreamy realm

The cloudy willow and the plumy elm :…

 

 

 

 

…..Thou beautiful ! From ev’ry dreamy hill

What eye but wanders with thee at thy will,…

 

 

 

…..Contented river ! and yet over-shy

To mask thy beauty from the eager eye ;

Hast thou a thought to hide from field and town ?

In some deep current of the sunlit brown…

 

 

 

 

 

…..Ah ! there’s a restive ripple, and the swift red leaves September’s firstlings faster drift ;…

 

Wouldst thou away, dear stream ? Come whisper near !

I also of much resting have a fear :

Let me tomorrow thy companion be,

By fall and shallow to the adventurous sea ! 

 

 

 Outre la soustraction et l'addition de mots, il a modifié la ponctuation de temps en temps.

 Le texte du chant est recomposé en cinq strophes. Si on considère les deux derrières strophes comme une,  chaque strophe s’applique bien aux quatre parties de la forme musicale ; Strophe 1 = V, Strophe 2 = W, Strophe 3 = X et les deux dernières strophes = Y.

  Nous notons deux additions dans la dernière strophe: « Dear Stream ? Come whisper near ! (cher fleuve ? viens, chuchote près de moi) » et « tomorrow (demain) ». Ce poème est composé en majorité en décasyllabes, mais en ces deux endroits ce n'est pas le cas dans l’original. Avec ces deux additions, Ives a converti les vers en décasyllabes.

 Les vers effacés correspondent à deux parties qui ne font pas la description de la scène du fleuve et une partie qui raconte invisibilité « Imagining thy silver course unseen (En imaginant ton cheminement argenté lointain) ». Peut-être qu’Ives a choisi des phrases descriptives qui racontent ce paysage comme texte chanté, et a remplacé l’expression imaginative par une structure musicale : pour décrire un cours invisible, il a mis des strates très complexes derrière la longue pédale de basse et la mélodie, par exemple.

 Si on regarde la mélodie avec minutie dans la version voix et piano, on ne trouvera pas seulement des figuralismes mais des similarités de structure de texte. Par exemple, au début de la pièce, le texte est constitué de deux mots et se termine par un point d’exclamation  donc Ives a mis la même mélodie sur ces trois strophes avec de petites modifications [14]. Et sur deux mots qui composent une rime en ‘y’ (dreamy/plumy) dans un premier paragraphe, il a mis la même mélodie de tierce mineure ascendante et seconde majeure ascendante. Des mots « realm/elm » et « hill/will », riment et terminent chaque vers, mis en musique par de longue notes. La troisième strophe commence par « Contented river ! », le même texte qu’au début; elle est composée des mêmes éléments et gardent la même atmosphère.

 

 


 

La citation

 

 La citation est une écriture caractéristique d’Ives. Il a souvent parlé des citations dans ses œuvres (par exemple dans Essay before a Sonata).

 Pour The Housatonic at Stockbridge, il n’a pas indiqué clairement les citations qu'il a utilisées, mais il est possible de comparer des phrases mélodiques de cette pièce avec d'autres œuvres pour lesquelles le compositeur a expliqué ses citations. On peut donc raisonner par analogie.

 D’abord, The Housatonic at Stockbridge était inspirée par la scène attendrissante de son voyage de noce et dans ce voyage, Ives a écouté une hymne de l’église située à côté du fleuve Housatonic. C’est facile à imaginer qu’il a choisi plusieurs hymnes comme la mélodie de cette pièce pour réaliser la même atmosphère qu’il a eu dans son voyage. Au moins, nous pouvons considérer qu’il y a quatre hymnes qui concernent la pièce; « Dorrance », «  Jesus,  Love of my soul », « Ye Christian Heralds, Go Proclaim » [15] et « There Is a Fountain » partiellement[16].

 Toutes les hymnes sauf « There Is a Fountain » débutent par la même note répétée 3 ou 4 fois et suivie d'une tierce majeure descendante. Elles sont les préférées d’Ives car il s'agit de la même structure que le motif du « destin » dans la Quatrième symphonie de Beethoven[17].

  « There Is a Fountain » est utilisé dans West London. Cette pièce est composée à la même époque que The Housatonic at Stockbridge. Elle a d’abord été  écrite pour un orchestre et arrangée pour voix et piano en 1921 aussi, et on peut trouver une petite phrase influencée par  « There Is a Fountain » dans la mesure 27 de la version voix et piano de ce The Housatonic at Stockbridge.

 

 

 En fait, dans The Housatonic at Stockbridge, Ives n’a pas vraiment cité des hymnes, mais il a composé une nouvelle mélodie avec des éléments musicaux des hymnes. Donc ce n’est pas tout à fait "la citation", mais par exemple la mélodie au début de cette pièce contient des points communs avec ces hymnes. Il y a la même structure interalliée, le mouvement descendant-ascendant-descendant et la similarité du rythme, par exemple.

 Par contre, les textes des hymnes ne correspondent pas à celui de The Housatonic at Stockbrige. Peut-être, un vers ‘While the nearer waters roll (pendant que l’eau tout près roule)’ dans « Jesus, Love of My Soul » est mis en rapport avec le fleuve, mais ce n’est pas la grande relativité.

 

 Ives ne gardait pas exactement les même notes ou les même rythmes des hymnes pour créer une nouvelle mélodie, donc la mélodie est composée librement. On peut trouver la structure mélodique correspond plutôt bien avec la structure du texte. Par exemple, les changements de tonalite correspondent à la division des strophes et les phrases correspondent ces vers du texte[18].

 La mélodie commence dans la registre grave et il monte jusqu’à une octave au-dessus par rapport au début. On peut considérer que ça correspond à la scène du fleuve qui s’élargit petit à petit vers la mer, et il y a des figuralismes aussi. Mais d’abord, nous confirmons la structure de la mélodie et regardons les détails des figuralismes plus minutieux après.

 Malgré qu’il y ait des pentatonismes et chromatismes souvent, il semble que Ré b majeur est la tonalité principale. La mélodie commence par cette tonalité, et dans la partie X on trouve do# mineur, c’est la gamme homonyme (par enharmonie) de Ré b, et La majeur serait le relatif de la sous-dominante de do# mineur, Ré majeur est la Napolitaine, fa mineur est un relatif de la dominante de Ré b et Do majeur est la dominante de ce fa mineur. Deux pentatonismes de Fa et Sol b dans la partie Y sont des pentatonismes de III et IV de Ré b. Par contre, il n’utilise pas la dominante de Ré b majeur ; La b majeur. Peut-être pour évitera des relations tonales trop franches. Mais si on cherche plus de détails concernant la phrase mélodique, on voit que la note La b peut être considérée comme une note importante.

 En détail, il faut remarquer un petit motif évoquant la Symphonie no 5 de Beethoven (Fa-Fa-Fa-Fa-Ré b dans les mesures 6-7, par exemple) d’abord. Ce motif qui est composé par quatre (ou de temps en temps trois) mêmes notes est utilisé souvent en début de phrase mélodique. Et après cette petite phrase qui contient le motif, Ives ajoute des notes en forme d’arc (regardez Fa-Lab-Sib-Lab-Fa-Mib dans la mesure 9). Et ce La b est utilisé dans presque toutes les phrases mélodiques. En plus la basse joue Do# et Sol# (La b) quasiment sur tous les temps. Quand il change la tonalité de Ré b au do# entre partie W et X, on trouve que la nouvelle phrase en do# est commencée par le motif au début en Sol#, c’est-à-dire La b.

 Dans la mélodie, Ives mets très peu le La bécarre. Par exemple, on trouve La bécarre dans les mesures 14-15, 17-18 ou 31 de la version voix et piano ; c’est le moment où il change la tonalité tout soudainement pour marquer l’expression du texte avec point d’exclamation et des sentiments étonnants. Nous en reparlons dans un paragraphe suivant.

Section

Strophe

Mesure Chant (Orch.)

Tonalite

 

V

I

6-13 (6-13)

Ré b Pentatonique

Accompagne la basse. Il semble être l’accord du premier dégrée de Ré b majeur.

W

II

14-15 (15-16)

16-17 (17-18)

17-18 (18-19)

18-19 (19-20)

La majeur ou Ré majeur

Ré b Pentatonique

La majeur ou Ré majeur

Ré b Pentatonique

Accompagne la basse. Il semble que l’accord du premier dégrée de Ré b majeur, donc les sections non écrites en Ré b semblent srtir plus du champ harmonique.

X

III

21-29 (22-31)

Mode de Sol sur Mi ou do # mineur (ca dépend comment on prend en compte Ré dans la phrase, s’il était inclut dans la gamme, cela serait Mode de Sol sur Mi, et s’il était une note accidentelle, cela serait do# mineur et Ré serait une note « napolitaine »)

Accompagne la basse. Il semble que l’accord du premier dégrée de do# mineur, mais il y a Fa en même temps, donc c’est toujours ambigüe avec Do# majeur.

Y

IV

 

V

31-32 (33-34)

32-33 (34-36)

33-34 (36-37)

34-36 (37-39)

36-37 (39-40)

37-38 (40-41)

38-40 (41-43)

Fa Pentatonique

Chromatisme (12 sons)

Do majeur

fa mineur[19]

Sol b Pentatonique[20]

Gamme par ton[21]

Chromatisme

La basse commence à bouger chromatiquement.

 

 

Le mouvement en zigzag entre Ré#-Do#

Z

 

 

 

Cluster

Les figuralismes

 

Dans ce paragraphe, nous émettons quelques hypothèses sur les figuralismes dans la version voix et piano. Nous avons déjà trouvé des rapports entre le texte du chant et la structure musicale de la mélodie, donc cette étude sur les figuralismes nous donnera une idée sur la manière dont la mélodie a été composée.

 

Mesure

Texte

Figuralisme

7

River

Ré b avec longue valeur représente une rivière ample.

9

Dreamy

Un mélisme ici (ascendant-descendant) exprime une nuance rêveuse.

11-12

The cloudy willow and the plumy elm

Une liaison de ces deux mots force à chanter cette phrase d’une seule émission de voix avant « the plumy elm », cela accentue deux figuralismes qui comportent les deux caractères contraires dans cette phrases ; la tierce mineure descendante de « willow » dépeint un saule tête baissée, et la phrase ascendante de « elm » représente la hauteur de l’orme.

14-15

Thou beautiful !

Une modulation un demi-ton au-dessus tout à coup et le rythme pointé donne une expression de surprise.

16-17

dreamy hill

Un mélisme (descendant-ascendant) pour « dreamy » donne la même expression qu'à la mesure 9, et la tierce mineure ascendante pour « hill » dépeint une colline.

18

eye but wonders

Une modulation un demi-ton au-dessus (la même que la mesure 14) exprime le mot « wonder (merveilleux) », et la note aigüe pour « but (mais) » marque le mot d’antiphrase.

23

Overshy

Un arc mélodique avec un rythme pointé corresponde le mot «OVER-shy (trop timide) ».

24

To mask thy beauty

La quarte augmentée descendante représente « To mask thy // Beauty// (de cacher votre ‘beauté’) ».

26

Hast thou

Cette phrase est un début d’interrogation, donc cette tierce majeure ascendante calque un accent interrogatif en anglais.

27-28

from field and town

Un mouvement en haut et en bas sur « field and town » adopte un contour mélodique sinueux.

28-29

In some deep current of the sunlit brown

La phrase débute par une note aigüe jusqu’au Ré grave en valeur longue, cela évoque le trajet des rayons du soleil comme dans le texte « sunlit brown (brun ensoleillé) ».

31-32

Ah ! there’s a restive ripple

C’est marqué comme a little faster (un peu plus vite) et la modération en Fa majeur. La phrase ici commence sur un contre temps et un rythme pointé (double croche-croche pointée) à la fin. Cela représente un air « restive (agité) » de « ripple (ride) ».

32-33

The swift red leaves… faster drift

Une phrase commencée avec une syncope se lie a un chromatisme ascendant avec des staccatos et liaisons. Cette coupe des notes et chromatisme exprime « swifted red leaves (les feuilles mortes prompt) ». Et un rythme pointé à la fin dépeint un mouvement de feuille.

33-34

Wouldst thou away, dear stream ?

Un changement de gamme: de chromatique à Do majeur, avec la nuance  mf. Ici, c’est un appel à la rivière et la seconde majeure ascendante à la fin calque un accent d’interrogation comme à la mesure 26.

34-35

Come, whisper near !

Tierce majeure descendante de la phrase avant avec un decrescendo et crescendo après « near ». Il demande à voix plus basse pour « whisper (murmure) »

36

a fear

Mi b de « fear (craindre) » est la note sensible de l’échelle de Fa mineur, et tout à fait dissonante avec la sonorité de la basse ici. Il marque un air de crainte.

36-37

Let me

Quinte diminuée ascendante de la phrase avant exprime un désir très fort « Let me (laisse-moi) ».

37-39

By fall…the adventurous sea !

Une phrase ascendante avec chromatisme et crescendo jusqu’à fff à la fin. C’est une représentation de la haute mer.

 

 

 


 

Les strates

 

 Maintenant, regardons l’écriture par strates en détail. Dans ce chapitre, je ne parle que de la version orchestrale car c’est l’originale de cette pièce, et que l’écriture par strates entre les instruments y est très fine.

 Sous la mélodie, Ives a placé ses instruments en couches, et ces couches s’appellent « strates » selon McKee Frayne[22]. Dans cette écriture, les voix jouent simultanément des phrases indépendantes, sans rapports apparents entre elles. Bien que le résultat semble confus, ça ne signifie pas qu’Ives composât cette pièce absurdement, mais plutôt systématiquement.

 

  Parties V et W

 On peut penser que la strate principale d’ici est jouée par les violons II et III. Elle est marquée comme sans sourdine et écrite en valeur plus longue (croche) que les autres strates. Cette strate est écrite souvent avec des intervalles de neuvième mineure (La-Si au début, par exemple) et tierce majeure (Sol-Si, Fa-La au premier fragment, par exemple). On peut trouver plusieurs répétitions, par exemple dans les mesures 4, 5 et 6 on trouve le même fragment qu’au début (mesure 1 et 2), et le motif des premières trois croches est utilisé partout dans ces deux parties. Dans les mesures 3-4 et 12, il y a un mouvement descendant en gamme par ton. Le phrasé de cette strate ne s'associe pas avec la métrique marquée (4/4).

 

 

 

 D'autres strates sont connectées avec cette strate principale. Violon I joue un motif chromatique qui est écrit en rythme de dizolet (de temps en temps en neunolets) et le phrasé de cette partie se synchronise avec celui de violon II-III, la strate principale. Des notes de ce motif forment des intervalles de quinte avec les sons de violon II-III (quinte diminuée de La et Mib, quinte juste de Sol et Ré, Si et Fa#, Fa et Do, La et Mi, et quinte augmentée Fa et Do#). Il garde ce motif presque dans toutes les parties V et W avec transpositions et petites modifications en plusieurs endroits. Les transpositions de ce motif est en gamme par ton normalement.

 

 

 

 La partie de violon IV est rythmiquement indépendante des autres violons. Écrite en doubles croches (il y a plusieurs exceptions comme le quintolet de doubles croches) elle semble très raisonnable avec une métrique à 4/4. Bien que cette strate ne soit pas synchronisée avec d'autres strates, on peut trouver que certains de ces sons sont comme des broderies et appoggiatures de la strate principale. Elle commence une seconde mineure en-dessous de la note de violons II-III normalement et brode ou rejoint chromatiquement la prochaine note.

 La partie d'alto est divisée en deux: l'une joue un ostinato et l'autre joue la mélodie. Cet ostinato d’alto est construit sur une talea (suite de durée) de 4 durées et une color (suite de hauteurs) de 6 sons. La suite de durée est composée de triolets liés (le rythme ; longue-longue-brève-longue). La suite de hauteurs est Mi-Ré-Ré#-Mi-Ré-Do#.  Il répète cette talea-color pendant quasiment toutes les parties V et X.

 Violoncelles et Contrebasse jouent une pédale de Do# quasiment tout le temps dans ces parties V et W.  La partie de violoncelle est divisée en deux, et la partie de dessus joue une petite phrase mélodique au début (par exemple, on peut en écouter un fragment Sol#-La#-Sol#-Mi#-Ré# dans les mesures 3-4). De temps en temps, la basse bouge suivant la mélodie principale. Il semble que des accords accompagnent la mélodie bien que les sons des strates soient très dissonants. Basson et trombone supportent cette basse. Le basson souvent joue en mouvement de zigzag (mesure 7-9, par exemple).

 Si on regarde ces parties V et W verticalement, on trouve que Ives a composé presque toutes les mesures en 12 sons. Les seuls moments qui ne contiennent pas les 12 sons sont les mesures 9, 12, 13 et 14. Dans la mesure 9 (il manque le Fa#), il y a un petit mouvement de basse, et après la mesure 12, il y a une phrase homorythmique de quintolet avec un mouvement de basse (il manque le Mi souvent). Nous nous intéresserons aux accords formés par les strates, en détail, après.

 

  Partie X

  Dès la mesure 21, la formation des strates change. Flûte, hautbois, clarinette, piano et alto jouent des strates, basson, trombone, tuba, violoncelle et contrebasse jouent toujours la basse, et violons et partie supérieure de violoncelle jouent la mélodie.

 Ce changement est atténué par des retards de violon I et II-III. Violon I continue de jouer sa strate en déformant son motif jusqu’au début de la mélodie à la fin de mesure 22. Il est noté « comme un son éloigné » sous la partie de flûte qui est déjà marquée ppp. Cela correspond aussi à un changement d’orchestration, certains mouvements de strates étant confiés à la flûte et au hautbois plutôt qu’aux violons II-III et IV, qui en profitent pour enlever leur sourdine avant de jouer le thème.

 Les strates ici sont plus répétitives qu’avant, mais certaines choses restent communes. Par exemple, un motif de hautbois et clarinette (les deux instruments jouent le même motif) est presque  identique à celui de violon I à la mesure 20 jusqu’au commencement de la partie X. La flûte joue un motif qui contient la même idée que celui de violon II-III : il comporte la valeur noire, rythmiquement discordant avec la métrique 4/4 et il contient l'intervalle septième mineur. La partie de dessus du piano varie ce motif de flûte avec une appoggiature de seconde mineure (c’était une caractéristique de la strate de violon IV), et la partie de dessous du piano joue un ostinato qui ne correspond pas bien à la métrique. En fait, flûte, hautbois, clarinette et les deux parties de piano ont une période commune un peu plus courte que le 4/4.

 La partie d'alto continue de jouer un ostinato, mais ce n’est pas le même qu’avant. Pendant les mesures 21-29, est joué un nouveau motif avec triolet et des accords de quinte juste entassée (Sol#-Ré#, Do-Sol-Ré). Dans la mesure 25, il y a une petite modification pour accentuer le Ré bécarre de la mélodie.

 Dans les parties précédentes, il y a un dodécaphonisme non sériel partout. Dans cette X, les strates de hautbois et clarinette sont écrites clairement chromatiquement mais des mesures 22 à 30, il manque le Fa# à tous les instruments sauf les instruments de la mélodie.

 À la fin de cette partie, la mesure 30, hautbois et clarinette termine leur ostinato avec des mouvements descendants en chromatisme, et la flûte arrête de jouer à la mesure 31. Les violons recommencent à jouer ces strates dans les parties V-W petit à petit. Les violons I jouent le même motif que les violons II-III au début, les violons II jouent celui des violons I un peu déformé, et les altos jouent le même ostinato qu’au début. Après la mesure 30 jusqu’à la mesure 43, le dodécaphonisme est de retour et nous pouvons trouver 12 sons dans chaque mesure.

 La basse joue toujours une pédale de Do# jusqu’à la fin de cette partie.

 

 

  Partie Y

 Après la mesure 32, c’est une partie dodécaphonique, et la pédale de Do# à la basse disparaît. Dans cette partie, on trouve 12 sons dans chaque mesure, et après la mesure 37, il y a 12 sons   sur chaque temps.

 

 

 

 Le commencement de cette partie est un moment de changement de strates graduel, mais cette fois, il y a une explosion de tension. De la mesure 32 à la mesure 34, des strates de cordes et piano d’abord changent ces motifs petit à petit. Dans la deuxième partie d’alto, il ajoute le mouvement en zigzag, et il y a des successions de notes entre violoncelle et cette partie d’alto. Par exemple, Fa # à la mesure 31 est conservé dans la deuxième partie d’alto à la mesure 32, et Ré dans la mesure 32 se trouve aux deux instruments, Do-Fa à la mesure 33 se trouve dans les deux parties et le Sib d’alto est une succession de Sib dans la partie de violoncelle à la mesure 32. Cette continuité des notes conserve une unité à cette phrase. On trouve de nombreuse quintes et quartes comme des intervalles dans le registre grave aussi.

 Dans la mesure 34, la clarinette et les deux parties de violoncelle jouent un passage ascendant en gamme par ton, et des altos jouent un arpège ascendant contenant un intervalle de quinte juste. Cette petite phrase ascendante est conclue par un passage descendant en chromatisme de violon, et cela continue au mouvement mélodique des cordes qui trace une cunéiforme après (Ré-Ré b–Do-Si–Sib–La-Sol#-Sol en violon I et Do-Do#-Ré-Ré#-Mi–Fa-Fa# à la basse vers mesure 34-35). Dans cette petite phrase passionnante, les violons I et la voix de dessus d’alto jouent ensemble, et les violons II correspondent à la voix de dessous d’alto.

 Au contraire de ce geste agité, des bois jouent des strates assez statiques comme celle d’avant cette partie Y, mais cette fois, joué f.

 

 

 Flûte et Clarinette jouent en quintolets, et les mouvements de ces deux instruments se synchronisent bien. Le hautbois joue un motif de dizolet qui ressemble à celui de violon I au début de la pièce. Basson, trombone et tuba supportent toujours la basse avec le piano qui joue des accords et accentuent la mélodie de trompette en même temps.

 Pendant la mesure 35 jusqu’à la mesure 38, les bois continuent ce qu’ils faisaient avant et les cuivres continuent de jouer la mélodie et la basse. Chaque corde joue indépendamment: violons, altos et violoncelles sont divisés en deux parties mais ils sont bien ensemble.

  Le mouvement de la basse à la mesure 37 correspond à celui de la mesure 35 ; septième mineure (octave diminuée) ascendante et mouvement descendant jusqu’à la quinte diminuée à la mesure 35 et octave augmentée ascendante et mouvement descendant jusqu’à la quinte augmentée.

 Après la  mesure 39, la basse commence un mouvement en zigzag de Do#-Ré# glissé, et une voix de violoncelle et contrebasse ajoute Fa# sur Do#.

 Sur ce mouvement de basse, la clarinette et les violons commencent un grand geste d’arc en gamme par ton. La deuxième partie d’alto participe à ce geste au début, mais dès la mesure 40, il joue des motifs chromatiques. Le hautbois joue un motif de gamme par ton et chromatique alternativement. La flûte arbore une phrase mélodique qui répète le Ré aigu, la mélodie principale se trouve aux parties de cor et trompette, et le piano supporte la basse à la main gauche et joue un mouvement en contre arc en gamme par ton à la main droite.

 Les trois dernières mesures de cette partie Y contiennent de nombreux rythmes complexes, mais le mouvement de la basse est un arc de gamme par ton qui uniformisent ces périodes en noire, ce qui donne une légère impression de marche.

 

  Partie Z

 Les tensions de la partie Y sont conclues dans le premier accord de la Partie Z. Cet accord doit être joué le plus fort de toute cette œuvre, selon son indication ffff. Le mouvement indépendant des strates s'achève, et on écoute un écho de la mélodie (une citation d’hymne) qui est jouée par des cordes à la fin.

 

 

Le plan des strates de la version orchestrale

 

 

Partie

mesure

Tempo

Mélodie

Strates des cordes

Strates des bois

Strates des cuivres

Basse

V        1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14

4/4 Adagio molto

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Poco rit.

 

 

 

 

 

Cor anglais Corn et Alto

Strates

Ostinato d’Alto 1

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Séquence de quintolet

 

 

Do#

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


W     15

16

17

18

19

20

a tempo

 

 

 

5/4

4/4

 

Strates Ostinato d’Alto 1

 

 

Do#

 

 

 

 

Do#

X      21

22

23

24

25

26

27

28

29

30

31

 

Violon et Violoncelle

Ostinato d’Alto 2

 

 

 

 

 

 

 


Ostinato d’Alto 1

Variation de Strates des cordes

 

 

Y      32

33

34

35

36

37

38

39

40

41

Più moto cresc.

 

accel. e cres. poco a p

Allegro moderato

 

 

Running…to 72=

Allegro con brio

Corn et Trempette

 

 

 

 

 


       + Alto

Variation du début

Chromatisme

 

 

 

 


Séquence de gamme par ton

 

 

Chromatisme

 

 

 

 


Séquence de gamme par ton

 

 

Variation de mélodie et basse

Chromatisme

 

 

 

 

 


Ostinato de Do#-Ré#

Z      42

43

44

 

Adagio

 

 

 

 

 

 

  Les accords

 Maintenant, on observe des strates verticalement.

 Si on extrait les notes incluses dans les parties excepté la mélodie, on trouve que les notes graves dans la première mesure sont composées par des sons harmoniques[23]. Par exemple, Do#-Sol#-Ré#-Fa dans la première mesure sont respectivement les 4éme-6éme-9éme-10éme sons harmoniques de Do#. Comme nous l’avons déjà dit, la basse (les parties de Violoncelle et Contrebasse) joue une grande pédale de Do#-Sol# presque tout le temps, mais il y a des endroits où la basse correspond bien avec le mouvement mélodique. On peut chiffrer des accords des instruments graves et la mélodie ; déjà à la mesure 6, on sent l’accord du premier degré de Ré b majeur par enharmonie (Do#-Sol#-Fa est identique à Ré b-La b-Fa) et le deuxième accord dans la mesure 7 est l’accord du quatrième degré chiffré 6/4, par exemple.

 La basse est bien stable jusqu’à la mesure 34 et il y a peu de notes juste au-dessus dans le grave,  par contre les notes aigües (des strates jouées par violon, alto et des instruments à vent) sont toujours nombreuses à cause des chromatismes. Le nombre de notes dans chaque mesure est petit à petit augmenté vers la fin, le registre des accords agrandit et la densité des notes enfle graduellement surtout dans le registre aigu.

 On peut trouver les 12 sons du total chromatique dans chaque mesure sauf que les mesures 12, 13, 14 et 20 par exemple sont des endroits où la basse bouge, et au début de la partie X, il manque le Fa# dans les strates (il y a de temps en temps le Fa# dans la mélodie) jusqu’à la mesure 29.

 

 


 

 

 

 

 

 

Z

 

 

 

 

 

 

 


 


Transcription pour voix et piano

 

 Comme nous en avons déjà parlé, il y a des plusieurs différences entre les deux versions. Pour la plupart, ce sont des changements d’indication de métriques et diminutions de durée des accords. L’indication de métrique est nécessaire pour un morceau d’ensemble compliqué, mais cette pièce contient des strates en règle générale assez indépendantes et elles ne suivent pas toujours la métrique. Il n’est pas difficile de déchiffrer la partition sans métrique pour petit ensemble, donc il abandonne l’indication de métrique dans cette transcription pour voix et piano, car elle ne suggère pas toujours le phrasé que le compositeur a projeté, peut-être.

 Il y a quatre endroits qui montrent une diminution de durée des accords, les mesures 12-13, 29, 32 et 39. À part à la mesure 32, toutes les diminutions se trouvent sous une note en valeur longue du chant, ce qui sans doute diminue un risque de manque de respiration pour le chanteur.

 Il y a aussi des changements de phrasés dans la mélodie. Par exemple, Ives a écrit des phrasés sur la mélodie d’alto pour indiquer des articulations d’archet dans les mesures 6-7 de la version orchestrale, mais pas dans la version vocale. Parce que cette phrase est clairement chantée d’une seule émission de voix en suivant le texte, donc il n’a pas écrit ce type de phrasé dans la partition pour voix et piano, peut-être. Il y a de petites modifications de cette nature, mais entre ces deux versions, la mélodie elle-même est peu changée. Il y a des changements de rythmes dans la dernière moitié souvent, mais peut-être pour faire correspondre les phrases à la prononciation du texte et cela n'entraîne pas de grande différence à l'écoute.

 La partie de piano ne joue pas toutes les notes de l’orchestre. Les strates de la version orchestrale sont trop chargées et impossibles à jouer par une pianiste, donc Ives en a choisi une de violon II-III (une strate principale) et mis une pédale de basse au début de cette transcription. Dans la partie X (mesure 20 de la version du chant), Ives a choisi des strates de la flûte et du piano de la version orchestrale (ces strates continuent dans le même esprit que la strate principale dans les parties précédentes). Après la mesure 32 de la version voix et piano, des notes aiguës de la main droite sont choisies à partir de la partie de violon I. Ces strates sont écrites en notation petite et Ives a noté que le pianiste peut omettre de jouer ces petites notes qu'il faut jouer de manière presque inaudible pour garder la même atmosphère que les violons en sourdine dans la version orchestrale.

 En regardant l’extrait des accords de cette version de voix et piano, nous constatons qu’Ives a abandonné l’utilisation des 12 sons. L’accord de la première mesure inclut 14 notes 7 sons (Do#-Ré#-Mi-Fa-Sol-Sol#-La-Si) et cette série des sons apparait très souvent jusqu’à la mesure 20. Après la mesure 20, des accords sont aussi composés avec cette série de sons, mais il manque de Sol bécarre souvent. À partir de la mesure 32, la basse commence un mouvement chromatique et les notes à la main droite ne conservent plus cette série.

 Pour conserver la logique de sons harmoniques, les deux versions gardent les mêmes notes de basse presque tout le temps, mais la première mesure de la version du chant contient une note plus grave que la version orchestrale. Nous avons déjà remarqué l’accord dans la première mesure d’orchestre contient les 4ème-6ème-9ème-10ème sons harmoniques de Do#, et dans cette transcription pour voix et piano, le premier accord est élargi et la pièce commence avec Do#-Sol#-Do#-Sol#-Ré#-Fa, les 2ème-3ème-4ème-6ème-9ème-10ème sons harmoniques de Do#. Comme nous l'avons vu des accords ne sont pas les mêmes que ceux de la version orchestrale (il comporte moins de son que dans la version orchestrale), cet élargissement d’accord harmoniques dans le registre grave serait pour conserver la même impression de sonorité avec la version orchestrale. Dans la partition, il n’y a pas d’instruction de pédale jusqu’à la fin, mais le début de cette pièce est normalement jouée avec au moins une pédale forte (c’est impossible de jouer le premier accord sans pédale). Si on joue cet accord qui contient des notes très graves avec une pédale forte, nous entendons une grande résonance dessus et ça donnera une impression plus semblable à la sonorité d’orchestre qui joue des strates en sourdine.

 Comme il y a des moments où nous pouvons entendre des accords tonals dans la version orchestrale, il y a des accords tonals dans cette transcription aussi. On entend également l’accord du premier degré de Réb (Do#-Fa-Sol#) souvent, et de temps en temps, il y a des séquences chiffrables que nous pouvons aussi trouver dans la version orchestrale.

 Dans cette transcription, Ives n’a pas utilisé de cluster à la fin. Il a utilisé la technique de cluster de clavier dans un autre chant (Majority) déjà, et il a écrit aussi un cluster de piano dans la version orchestrale de la pièce, mais cette fois, dans cette transcription pour voix et piano, il a mis tous les sons inclus dans Fa majeur (Fa-Sol-La-Sib-Do-Ré-Mi) au piano sous le Fa du chant. Cet accord est composé comme Sib-Ré-Fa-La-Do-Mi-Sol du registre grave vers l'aigu, et n trouvons Sib 3 fois, Ré 4fois, Fa 3 fois, La 2 fois, Do 1 fois, Mi 1 fois et Sol 1 fois dans l’accord. Dans la version orchestrale, la note la plus grave d’ici est  le Do de la contrebasse, le plus aigu est Fa# de la flûte[24], et la note la plus jouée est Sol. Donc il y a un changement assez particulier ici.

 

 


 

Conclusion

 

 The Housatonic at Stockbridge est une œuvre très courte, 44 mesures dans la version orchestrale qui durent environ 4 minutes. Mais dans ces 44 mesures, Ives a réalisé son concept simple et clair avec de nombreuses techniques neuves. Elle présente une mélodie d’hymne derrière un paysage de fleuve, musicalement. La mélodie tonale semblable aux hymnes très chantantes, dans la pièce, contraste avec des strates qui sont écrites de manière atonale et polyrythmique. Cette écriture des strates contient 12 sons systématiquement, mais ce n’est pas la même chose que pour d'autres compositeurs qui écrivent des pièces avec 12 sons comme Webern ou Schoenberg, par exemple. L’utilisation de 12 sons est bien contrôlée, mais Ives a accepté d’avoir une impression tonale de temps en temps, et il contient aussi une idée de sons harmoniques et de périodicité. Dans cette pièce, nous avons trouvé différentes périodicités de rythme dans les strates, et il y a plusieurs ostinatos sur grande pédale de basse. En pensant que la pièce est écrite en 1914, Il est vraiment surprenant qu’Ives est déjà établi des manières si rénovatrices pour "conduire les sons".

 En plus, The Housatonic at Stockbridge est écrit dans des circonstances un peu particulières ; il y a un texte dans la version orchestrale et le compositeur lui-même a arrangé la pièce en une version pour voix et piano après. Grâce à cette transcription, nous pouvons avoir plus d'informations sur les idées du compositeur ; une recherche sur la relation entre la mélodie et le texte nous donne une idée plus claire sur la structure de pièce, la comparaison entre les deux versions nous suggérerait que la voix est la plus importante: nous pouvons trouver des figuralismes dans la mélodie du chant, et cela nous aide à comprendre mieux ces phrases mélodiques dans la pièce — les changements de tonalité soudains n'interviennent pas par hasard, mais sont aussi bien contrôlé et élaboré par le compositeur.

 Ce mémoire est consacré à une petite pièce, mais nous avons pour projet de continuer cette recherche dans le futur. Il faudrait comparer ce The Housatonic at Stockbridge avec d'autres mouvements de cet Orchestra Set No.1 ou d'autres œuvres d’Ives.


 

Documents et Partitions

 

La formation de la version orchestrale

Instruments

Nombres de parties

Instrument à vent en bois

Flute

1

Cor anglais

1

Hautbois

1

Clarinette (Sib)

1

Basson

1

Instrument à vent en cuivre

Cor (Fa)

2-4

Trompette (Sib)

2-4

Tuba

1-3

Percussion

Timbale (Do#)

1

Piano

1 (pour 4 mains)

Après la mesure 21, un pianiste joue le célesta et un autre joue une partie qui originairement était écrite pour 2 harpes.

Instrument à cordes

Violon

4

Alto

2

Violoncelle

2

Contrebasse

2

Optionnel

Orgue

1

 


Le texte

 

 

Le texte original en anglais

La traduction en français

 

 

The Housatonic at Stockbridge

 

« Contented river ! in thy dreamy realm---

The cloudy willow and the plumy elm…

 

Thou hast grown human laboring with men

At wheel and spindle ; sorrow thou dost ken ; …

 

Thou beautiful ! From every dreamy hill

What eye but wanders with thee at thy will,

Imagining thy silver course unseen

Convoyed by two attendant streams of green….

 

Contented river ! and yet over-shy

To mask thy beauty from the eager eye ;

Hast thou a thought to hide from field and town ?

In some deep current of the sunlit brown

Art thou disquieted---still uncontent

With praise from thy Homeric bard, who lent

The world the placidness thou gavest him ?

Thee Bryant loved when life was at its brim ;…

 

Ah ! there’s a restive ripple, and the swift

Red leaves---September’s firstlings---faster drift ;

 

 

Wouldst thou away !.....

I also of much resting have a fear ;

Let me thy companion be

By fall and shallow to the adventurous sea ! »

 

 

 

Le Housatonic à Stockbridge

 

« Ô fleuve content ! dans ton royaume de rêverie –

Le saule sobre et l’orne à grandes plumes…

 

Tu es devenu humain en travaillant avec des hommes

Au rouet et fuseau ; tu as vu du chagrin ; …

 

Ta beauté ! de chaque colline rêveuse

Quels yeux ne te suivent pas à ton plaisir,

En imaginant ton cheminement argenté lointain

Accompagné de deux ruisseaux verts…..

 

Ô fleuve content ! quoique trop timide

Tu caches ta beauté des yeux avides 

As-tu une pensée à cacher au champ et au village ?

Dans un courant profond d’un marron ensoleillé

Es-tu inquiet – toujours mécontent

Des louanges de ton poète homérien, qui prête

Au monde la sérénité que tu lui as donnée.

Toi, Bryant aimait quand la vie était toute remplie…

 

Voilà ! une petite ride rétive, et les feuilles rouges,

Rapides – les premiers-nés de septembre – dérivent plus rapidement.

 

Partirais-tu !....

Moi aussi, d’oisiveté j’ai peur ;

Laisse-moi t’accompagner demain

Pas cascade et bas-fond jusqu’à la mer aventurière. »

 

 

 

 

Traduction par Tyler Boddy Spargo.



 

 

Les partitions des hymnes

 

 

      

 




[1]Ȁ VINAY, 2001, p.106.

[2]Ȁ KIRKPATRICK, 1991, p. 87.

[3]Ȁ KIRKPATRICK, 1991, p.161.

[4]Ȁ KIRKPATRICK, 1991, p.83.

[5]Ȁ KIRKPATRICK, 1991, p. 87.

[6]Ȁ Ives et sa femme.

[7]Ȁ SHITAMICHI, 1997, p.28.

[8]Ȁ KIRKPATRICK, 1991, p. 169 - 175. HATTORI, 1998, p.3.

[9]Ȁ MCKEE FRAYNE, 1992, p.37-38. Regardez son tableau formel ici.

[10]Ȁ KIRKPATRICK, 1991, p.168. Il y a un point d’interrogation pour la date.

[11]Ȁ KIRKPATRICK, 1991, p.60, 168.

[12]Ȁ KIRKPATRICK, 1991, p.151, 169.

[13]Ȁ KIRKPATRICK, 1991, p.168-169.

[14]Ȁ Il a évité de mettre la même phrase sur le texte « Thou beautiful ! » au début de la deuxième strophe et a écrit une phrase en différentes tonalités soudain ici. Cela donne une impression plus accentuée sur les mots d’admiration.

 

[15]Ȁ MACKEE FRAYNE, 1992, p.54.

[16]Ȁ SHTAMICHI, 1997, p.32-34.

[17]Ȁ SHITAMICHI, 1997, p. 32, KIRKPATRICK, 1991, p.185-204.

[18]Ȁ Sauf que « September’s firstlings faster drift » dans la quatrième strophe (mesure 32)  lié avec un vers précèdent.

[19]Ȁ Dans la version orchestrale, la trompette joue la mélodie en si b mineur.

[20]Ȁ Dans la version orchestrale, le cor joue la mélodie en pentatonique de Do.

[21]Ȁ Dans la version orchestrale, la voix principale n’est pas très claire ici et la trompette joue chromatisme.

[22]Ȁ FRAYNE MACKEE 1992.

[23] Le violoncelle et la contrebasse.

[24] Il y a La# aigue du piano, mais la continuation de son de piano n’est pas assez forte.

 

 

Références

 

 

 

 

HATTORI, Tomoyuki (1998). チャールズ・アイヴズの歌曲における旋律と伴奏の関係《ウェスト・ロンドン》分析― (La relation entre melodie et accompagnement de "West London" de Charles Ives)). 美学論究第十三編 (Bigakuronkyuu 13), 1-16.

 

KIRKPATRICK, John (1991). Charles E. Ives Memos. New York: W. W. Norton & Company, Inc.

 

MACKEE FRAYNE, Robert (1992). An Analyse of Partitions and Strata in Charles Ives's Three Places in New England. Ottawa: un memoire de maitrise de l'University of Ottawa.

 

SHITAMICHI, Ikuko (1997). チャールズ・アイヴズ研究その音楽語法と哲学 (Charles Ives: son ecriture et la philosophie). 東京音楽大学研究紀要21 (Tokyo College of Music), 27-42.

 

VINAY, Gianfranco (2001). Charles Ives et l'utopie sonore américaine. (M. Raiola, Trad.) Paris: Editions Tum/Michel de Maule.

 

 

 

 

 

 

 Partitions

 

IVES, Charles (1935). Three Places in New England an Orchestral Set. Pennsylvania: Mercury Music    Corporation.

 

IVES, Charles (1954). Twelve Songs for Voice and Piano. New York: Southern Music Publishing Co.

 

IVES, Charles (1935). Nineteen Songs. USA : Merion Music, Inc.

 

IVES, Charles (1933). 114 Songs. USA: Merion Music, Inc.

 

IVES, Charles (1921). Piano Sonata No.2 'Concord, Mass., 1840–60'. New York: Knickerbocker Press.

 

IVES, Charles (1942). Sonata No.4 for Violin and Piano. New York: Assosiated Music Publishers, Inc.

 

IVES, Charles (1953). The Unanswered Question for Chamber Orchestra. New York: Southern Music Publishing Co.

 

Les partitions d’hymnes : http://www.hymnary.org/

 

 


 

 

 Discographies

 

Charles Ives: Songs, Vol. 1, enregistré en 2008, Naxos [8.559269].

 

Charles Ives: Songs, Vol. 3, enregistré en 2008, Naxos [8.559271].

 

Charles Ives: Songs, Vol. 4, enregistré en 2008, Naxos [8.559272].

 

Charles Ives: Ives: Symphony No. 2; Robert Browning Overture, enregistré en 2008, Naxos [8.559353].

 

Charles Ives: Emerson Concerto / Symphony 1, enregistré en 2003, Naxos [8.559175].

 

Charles Ives: Ives: Symphony No. 2; Robert Browning Overture, enregistré en 2000, Naxos [8.559076].

 

IVES: Piano Sonata No. 2 / The Celestial Railroad. enregistré en 2004 Naxos [8.559127].

 

The Unknown Ives, Volume 2. enregistré en 2004, New World Recordings [B0002WZTJ8].

 

Symphony No. 1, 2, 3, 4, A Symphony : New England Holidays, Hymm, The Unanswered Question, Central Park in the Dark, The Unanswered Question. (Michael Tilson Thomas, Chicago S.O., Concertgebouw O.), Sony essentialclassics, [SB3K87746].

 

The Side Show Song of Charles Ives. enregistré en 2002, Soupir editions [S221].

 

Charles Ives A Song Book. enregistré en 2010, HAT HUT Records Ltd. [hat[now]ART183].

 

Copland: Appalachian Spring / Short Symphony/ Ives: Symphony No. 3.enregistré en 1994, Intersound Records [B000000C9Q].

 

Ives: Piano Trio, Violin Sonata No.2 & 4. enregistré en 2008Warner Classics [B001G5ZO4U.